jeudi 29 juillet 2010

C'est un véhicule lunaire? Un Bulldozer de l'armée israélienne?






Non, c'est un camper!
Oui monsieur, les européens ne prennent pas seulement l'Islande pour leur terrain de camping, ils le prennent aussi pour leur nouvelle planète (slash) zone de guerre (slash) contrée inexplorée. Et ils ont décidé que c'était pas en Firefly que ça se passait. De toute façon, quoi de mieux pour apprécier la nature qu'un véhicule aussi pesant qu'un tank qui consomme comme un camion de vidange? Je vous le demande...

mardi 27 juillet 2010

Du sang plein les yeux (attention, les photos sont à la fin)

Confessions : J’ai déjà joué au baseball avec des grenouilles. J’ai aussi noyé des chenilles. J’ai pêché des étoiles de mer pour les faire sécher. J’ai déjà songé à attraper un papillon tropical pour le photographier. Voilà, mon père, le compte est bon. Puis-je aller en paix?

Non, je crois que je ne le puis pas. Quel fardeau incroyable que d’aimer les animaux à la folie mais d’être suffisamment lucide pour savoir que la terre entière ne se mettra pas à manger de la tourbe pour les beaux yeux des bébés phoques. Vendredi dernier, la (mal)chance a choisi de me lancer au cœur de la controverse animaliste, en faisant advenir deux évènements importants à quelques heures d’intervalle : mon arrivée aux Îles Féroé et un grind de chasse à la baleine, dans une des baies de Torshavn, la capitale. Ce matin-là, j’aurais très bien pu refuser de voir, juste ignorer l’événement et terminer mon café comme si de rien était. Mais quand on m’a annoncé que les chasseurs étaient partis après un troupeau quelques minutes plus tôt, c’était déjà trop tard. Impossible pour moi de savoir et de fermer les yeux. J’ai senti que je devais aller au bout de l’expérience parce que la seule chose que je pouvais faire par la suite, c’est d’en parler. Ça sonne un peu cucu comme ça, mais comme je n’avais l’intention ni de participer, ni de me garrocher sur eux en leur hurlant d’arrêter, je me suis dit que le mieux était de faire ce que je m’exerce à faire depuis le début de mon voyage, regarder et réfléchir et être cynique.

Notre hôte férogïen nous a gentiment déposées là où ça se passe, une baie sablonneuse entourée de collines. Pendant environ une heure, nous avons regardé les gens s’accumuler sur les lieux. Tout le monde, de toutes les générations pouvant y être y était sûrement. Quand ça arrive, le temps s’arrête sur les Îles. Ceux qui peuvent quitter leur travail pour une heure ou deux le font. Même pas besoin d’avertir le patron, si ça se trouve, il est lui-même déjà là-bas. J’étais terriblement nerveuse en arrivant. Je trouvais ces moments d’attente insupportables. Lentement, les chasseurs s’organisaient sur la plage, mettaient les cordages en place. Tout était très hiérarchisé, chaque personne a une tâche particulière et est tenue de la respecter. Au loin, on ne pouvait qu’apercevoir les bateaux de pêche formant une ligne, afin de rapprocher les bêtes de la côte. En faisant des recherches sur internet, j’ai trouvé ceci :

Observation of the Pilot Whales indicate that they work together in order to get the food that they want. Engaged in a type of high pitched whistle, they will create a circle that seems to mesmerize the prey and then they can consume it with ease.

En gros, c’est un peu ce que les chasseurs font, ils désorientent les baleines avec du bruit et les dirigent vers la berge avec leurs bateaux. Ainsi, tout ce que l’on voit jusqu’au dernier moment, c’est une ligne de bateau qui s’approche tranquillement. Au dernier moment, on aperçoit les globicéphales sautant comme les dauphins. C’est à ce moment que je me suis mise à pleurer encore plus, à gros sanglots, en voyant des baleines vivantes, prises au piège, déjà mortes. C’est le même désarroi quand je croise des camions d’animaux sur la 20, décuplé par le fait que je sais que c’est dans environ 30 secondes qu’elles vont se faire charcuter et que je suis là, à regarder.

30 secondes plus tard, les chasseurs courent à l’eau pour intercepter les baleines et leur trancher ce qui j’imagine doit être leur gorge. Dans la marée rouge qui se crée presque instantanément, les bêtes tombent au combat et une fois inertes, sont tirées de l’eau pour être identifiées, et ensuite être ramenée en bateau jusqu’au port. Chaque personne ayant participé à la chasse recevra, en fonction de son rôle, un morceau de sa baleine, préalablement numérotée.

Malgré avoir vu, photographié, revu en photo plusieurs fois et écrit la chose, ma gorge se serre encore et je revois par flash, le court instant où j’ai aperçu les baleines coincées devant les bateaux, quelques secondes avant qu’elles soient prises d’assaut par les chasseurs. Et malgré toutes les larmes que j’ai pu verser pour ces bêtes piégées, je souffre un peu plus de ne pas pouvoir me réfugier dans de l’émotion brute, et de ne pouvoir crier à l’injustice devant ce que j’ai vu. Parce que contrairement à plusieurs qui ont des opinions sur le sujet, MOI, j’ai vu. J’ai vu une mise à mort rapide et non complaisante. J’ai vu un travail organisé, structuré par des professionnels, soucieux de ne pas perdre de temps. Je ne saurai jamais si ces hommes, jeunes et vieux sont fiers et heureux de prendre ces énormes mammifères à bras-le-corps pour les saigner à mort. Mais à la limite, je m’en fous. Ce qui comptait pour moi, c’est de savoir/voir qu’en tuant des baleines, ils ne jouaient pas au même jeu que moi enfant, qui noyait des chenilles avec insouciance, pour le plaisir.

La chasse au globicéphale n’est pas une corrida marine, il n’y a pas de foule en délire et les chasseurs ne s’amusent pas à exciter les bêtes à coup de couteau. Contrairement à ce que les animalistes radicaux en disent, elle n’est pas non plus semblable à l’hypocrite chasse au dauphin de Taji (voir le film The Cove), parce qu’ici rien n’est caché (au contraire, c’est tout juste s’ils ne l’annoncent pas à la radio) et la viande de globicéphale est soigneusement distribuée dans les familles de chasseurs, avec une priorité aux aînées lorsque la ressource est rare.

Peut-être que je suis un peu naïve de voir ça comme ça. Chacun sa façon de survivre.

Dans l’absolu, j’aimerais que cette pratique cesse parce que j’aime les baleines comme j’aime tous les autres animaux. Elle cessera sûrement dans quelques années parce que comme pour les dauphins de Taji, la viande de globicéphale est de plus en plus toxique. J'imagine que le jour où ils ne chasseront plus la baleine, une forêt de plus sera défrichée et quelques vaches de plus partiront pour l'abattoir. La vérité, c'est que ce qui me préoccupe plus que des gens qui vont chercher leur alimentation à même la nature dans un spectaculaire bain de sang, c’est ceux qui, a chaque semaine, vont chercher à l’épicerie, des paquets bien emballés de viande anonyme qu’ils mangeront tranquillement devant le téléjournal, en s’insurgeant devant « ces barbares de chasseurs de phoques », sans se soucier de comment l’animal dont ils mastiquent énergiquement la chair, a mené sa vie, et encore moins de comment il a mené sa mort.

Voilà, c'est dit.






Commencez à pleurer ici...











lundi 26 juillet 2010

La route vers Seydisfjordur






La recette gagnante

Après notre journée à Husavik, nous avons tenté de poursuivre notre chemin vers Egilsstaldir pour prendre de l’avance sur notre horaire. Nous avons pris le bus jusqu’au Lac Myvatn, pour se placer directement sur la route 1. C’était vraiment une mauvaise idée. C’est à travers cette mauvaise idée, qui nous à mené à notre première (et dernière je l’espère) nuit à la belle étoile, que j’ai commencé à me poser plusieurs questions sur le sens que prenait notre voyage…

Tous ceux qui m’ont demandé des nouvelles depuis mon départ ont reçu sensiblement la même réponse : «Tout va bien, il fait froid, mais c’est magnifique…», magnifique, fabuleux, extraordinaire, à couper le souffle, je commence à venir à bout de superlatifs pour décrire l’Islande, qui elle n’a pas l’air du tout fatiguée de nous montrer quelque chose de mieux encore, à la courbe suivante. Il semble donc que je vais devoir sortir mon dictionnaire de synonymes pour élargir mon vocabulaire, parce qu’à moins d’élargir mon portefeuille, je continuerai de n’avoir accès que visuellement au spectaculaire paysage islandais. Alors même si je suis presque devenue aveugle de voir tant de beauté à travers les vitres de voitures ou d’autobus, mes autres sens demeurent largement sous-stimulés. C’est sûr que voyager dans un pays de grande nature, c’est pas comme se planquer à Rome pour un mois et être en plein dedans. Ici, il faut faire beaucoup de déplacements et même si on est là, j’ai parfois l’impression qu’on est dans une petite bulle, avec notre petite bouffe, et notre minuscule pouce, qui ne fait pas le poids sur les longues routes au milieu des volcans. Je ne sais pas si ça a à voir avec la façon dont le tourisme est organisé ici. Dès notre arrivée, on a été submergées par des dépliants de tours pour voir tel volcan, tel Geyser, gravir tel glacier, (en 4x4 super-méga lunaire) se baigner dans tel lac. C’est très localisé, orienté vers des endroits spécifiques qu’il faut voir comme si la qualité du voyage en dépendait. Et comme ceci entraîne cela, c’est ce qui fait qu’Isa et moi, on s’est trouvé coincées au lac Myvatn, un endroit sur-touristique où tous les hôtels sont pleins. Ainsi, après deux heures de pouce infructueux, on a sorti nos sleepings pour une nuit «sous les étoiles».

Il ne faut pas se méprendre, je suis contente de voir tout ce que je vois, je ne regrette pas un sous dépensé ici. Mais je peine encore à créer un lien avec le lieu, un attachement émotif, chose que j’ai faite instantanément en débarquant en Écosse et aux Iles de la Madeleine. À tout ceux qui roulent des yeux, JE NE ME PLAINS PAS!!! Je réfléchis seulement. Je vais quand même pas jusqu’à dire que je m’ennuie des Marocains qui harcèlent les touristes dans les souks mais là…je commence à épuiser mes ressources de small talk avec les marchands!

Tous les ingrédients sont pourtant là, la mer, les falaises, les oiseaux, le vert, les montagnes, la neige, les bateaux. Même la garniture y est : l’humour, l’ironie, les coïncidences, les animaux (morts)… Rien à faire, je trouve mon expérience un peu désincarnée. Des fois je me dis que mon Islande est un gâteau qui ne lève pas.


Alors voici des photos prises de notre petite bulle de bus, après notre nuit dehors! Que c'est beau de loin...














dimanche 25 juillet 2010

Road trip dans la brume

















Isa et moi avons énormément de chance, notre hôte nous a offert sa voiture pour aller visiter les Îles. Le lendemain, nous avons fait ni une ni deux et nous nous sommes lancées sur les routes sinueuses et pentues de l'archipel. Il nous a fallu quand même une petite séance de stratégie, dont le résultat le plus important est notre décision d'inverser les rôles de conducteurs et de co-pilote, un choix ma fois judicieux. Contre toute attente, j'ai donc pris le volant d'un grand vitara manuel 4x4 qui nous a mené courageusement jusqu'au bout du monde.

Quand je dis courageusement, c'est pas peu dire. Le trafic est inexistant et les routes sont en excellentes conditions MAIS, elles sont souvent étroites et quand je dis étroite, je veux dire à une voie. Même certains tunnels sont à une voie, ce qui veut dire qu'une des deux voitures doit se ranger dans les espaces prévus à cette fin. C'est pas que c'est difficile mais ça demande une concentration genre absolue.

Comme pour l'Islande, les superlatifs me manquent pour parler de la beauté du paysage. Ce qui commence à me manquer aussi, c'est le contact humain avec les locaux. Enfin, on se console en se disant qu'on a probablement dû voir presque la totalité de l'autre population des Féroé, soit les 70 000 moutons qui gambadent librement dans les prés verdoyants.

samedi 24 juillet 2010

Il n'y a pas que des phallus au formol à Husavik, il y a aussi des gros béteaux





Au royaume du dieu Priapus...(pas de photo sans consentement alors...)


Comme je l'ai dit précédemment, c'est pas nécessairement facile de faire du pouce ici. C'est pas comme si les voitures se garochaient pour nous embarquer. Ainsi, nous avons décidé d'élargir nos horizons pour deux jours en n'ayant pas de destination précise et en prenant le premier lift qui nous amènerait, soit à Husavik, soit à Reykjahlíð. Parce que la sortie d'Akureyri, c'est pas l'échangeur Turcot, y'a juste deux directions.

Après deux bonnes heures d'attentes, nous sommes arrivées à Husavik avec une dame (notre première fille) qui allait vendre ses tricots à une boutique d'artisanat. Husavik est le Tadoussac islandais, la place pour payer cher et espérer voir des baleines se pitcher en l'air à deux mètre de ton bateau. Mais peut être que certains d'entre vous avez entendu parler de cette ville pour une autre raison, pour un musée plutôt original en théorie, et plutôt creepy en pratique: Le musée phallologique de Husavik. Je sais qu'il y a des tonnes de blagues à faire sur les raisons qu'on peut avoir pour aller visiter cette place. Moi, j'ai un faible pour les animaux empaillés et autres ex-vivants dans le formol. Oh que j'ai été servie.

Ce genre de musée ouvre la porte à un potentiel énorme de mauvais goût. Parmis celles-ci, des lampes en scrotum de porc, faites à la main par le conservateur, des cartes postales grivoises et tous les autres objets quotidiens (spatule, poignée de porte, coutellerie, etc) dont le manche est évidemment fait en forme DE. Le musée comporte une partie socio-antropologique, mais celle-ci est trop petite pour justifier cet énorme ramassis de phallus d'animaux. Moi je trouvais qu'il y avait tellement de pistes possibles sur le rapport à la masculinité, la virilité, n'importe quoi sur la relation de fascination/fierté que les hommes entretiennent avec leur pénis. Mais non...au lieu de ça, plus de 200 «spécimens» , empaillés ou mis en pot, dans une esthétique plutôt In your Face...De plus, même si le formol est efficace pour la conservation, il ne l'est pas vraiment pour la préservation, donc ça avait plus l'air de bébés aliens entrés de force dans des pots mason géants que de la-moitiée-de-la-chose-qui-fait-que-le-merveilleux-miracle-de-la-vie-arrive.

Mais bon...ça reste une expérience étrange/fascinante comme je les aime. J'en ai vu de toutes les sortes, ya pas à dire: énormes, longs, minuscules, tordus, séchés, ridés, lisses...et à l'origan. Du cachalot au hamster, de l'ours polaire à la sébaste, en passant par l'équipe islandaise de handball 2008 (en moulage seulement)... ils y sont tous...rigor mortis.
C'est dans ces moments qu'on regrette les regrettés parce que s'il était encore vivant, Brassens en aurait sûrement fait une chanson...

vendredi 23 juillet 2010

Parce qu'en faisant du pouce pendant une heure, on a le temps de regarder le paysage...




Attention, contenu pouvant choquer...




Le nord de l’Islande se targue d’être l’endroit numéro un pour observer les baleines en Europe. Comme pour la région de Tadoussac, on retrouve toute la publicité d’usage, avec les baleines à bosses qui sautent hors de l’eau et agitent leur énorme queue sous l’œil émerveillé des touristes, que photoshop a permis de rapprocher à quelques dizaines de pieds de l’animal. Je crois que certains graphistes oublient que les brochures contiennent parfois des informations sur la flotte de l’entreprise, telle que la longueur du bateau. Ça donne lieu à quelques incohérences un peu grossières (qu’une baleine de 18 m qui sort au trois quarts de l’eau mais qui ne fait que le tiers de la longueur du bateau de 15 m) mais bon, comme le reste, c’est pour vendre du rêve, parce qu’on attire pas les mouches avec des dos de petits rorquals. Enfin, après avoir vu beaucoup de baleines quand j’étais sur le voilier en route vers les îles l’an dernier, je me suis dit que les baleines islandaises ne seraient pas choquées d’avoir à faire une pirouette de moins si j’étais pas là pour les voir.

Donc, j’ai pas vu de baleine vivante. Je ne sais pas si c’est une chance, mais en tout cas, j’ai eu l’occasion d’en voir une morte. En fait, c’était un dauphin à bec blanc. Isa est venue me réveiller lundi matin en criant, «ils ont pêchés un requin!!!». Je me suis habillée en vitesse et je suis descendue au quai. En approchant de la bête et en regardant sa silhouette (ce qui en restait), j’ai vu que c’était un dauphin. Il s’était pris dans les filets des pêcheurs et apparemment, ils n’ont pas le choix de le tuer quand ça arrive, soit une ou deux fois par année. Quand on m’a expliqué ça, j’ai tout de suite revu la scène de La grenouille et la baleine où Daphné plonge tout habillée dans le golfe pour aller sauver sa baleine prise dans les filets. J’ai tellement rêvé longtemps d’être comme elle, de pouvoir entendre plus que les autres. Maintenant j’ai la preuve, je n’ai pas ses oreilles bioniques parce que je n’ai rien entendu, ni les cris du dauphin prisonnier, ni le coup de fusil qui l’a tué, ni le moteur du bateau revenu ou les cinq hommes qui ont chargé la bête sur le quai. Moi, pendant que tout ça arrivait, je dormais dans un sommeil profond, assourdi par le cri des sternes surexcitées de voir le buffet de viande qui s’amenait vers eux.

Quand je suis arrivée sur place, la moitié de la bête était déjà ouverte et dépecée, la viande reposait déjà sur la glace. Le pêcheur tranchait la peau épaisse rapidement et avec agilité, si bien, qu’Isa avait des doutes sur la réelle fréquence de ce genre d’accident. Enfin, je est resté là à regarder, à la fois fascinée et dégoûtée par le spectacle. J’ai pris beaucoup de photos et Isa a fait un vidéo, c’était tellement incroyable comme truc que j’arrivais pas à tout l’assimiler d’un coup. Ils ont fait deux grandes incisions, le long de la colonne et ensuite, de chaque côté ils sont découpé en trois partie la peau épaisse, semblable à du caoutchouc. Il y avait beaucoup de sang. Ce n’est pas ça qui m’a écœuré. C’est plutôt un petit garçon en coton ouaté bleu, joufflu et trop vieux pour être encore mignon. Il tournait avec excitation autour de l’animal, comme un chasseur fier de sa proie. Puis, il m’a écarté et comme s’il voulait absolument faire partie de la scène, il a posé son pied sur la tête de la bête. J’ai roulé des yeux d’exaspération et j’ai détourné le regard de son vieux running shoe de petit joufflu pour voir la seule partie encore intacte du dauphin qui, malgré une coulisse de sang qui frôlait son oeil et une autre, dégoulinant de sa bouche entrouverte, semblait toujours sourire.

The Birds version polaire...

Pendant nos quatre jours sur Grimsey, nous avons arpenté de long en large la petite île, volontairement et involontairement. Cet endroit est un vrai paradis pour les oiseaux, les macareux, les razorbills (désolé, je ne me rappelle plus du nom francophone) et les sternes arctiques. De toute ma vie d’amoureuse des animaux, je ne pense pas avoir rencontré d’animaux aussi hostiles que ces petits oiseaux gris et blancs. En général, les animaux, si on les laisse tranquille, ils continuent leur chemin. Ben, ces petites vaches de sternes ne fonctionnent pas comme ça. Pour protéger leur territoire, elles n’hésitent pas à plonger sur les intrus pour leur frôler la tête. Mais c’est pas comme si on allait proche de leur nid ou qu’on les écœurait, même pas proche. Littéralement, on les dérange quand on marche sur la route. Du coup, ça devient un peu extrême de marcher et d’avoir une horde d’oiseaux à bec rouge qui piaillent au-dessus de nos têtes, et qui plongent à répétition à quelques centimètres de nos cheveux.

Ça reste malgré tout étrange et inquiétant de ressentir autant d’hostilité de la part de ces animaux. Il y en avait tellement, c’était impossible de ne pas penser à The Birds de Hitchcock. Manque de bol pour les sternes, elles sont blanches et grises alors sous un ciel nuageux, ce n’est pas aussi imposant qu’une horde de corbeaux en colère. Mais elles se rattrapent allègrement sur le plan vocal, avec un cri (qui fait qqch comme krrrrrrrrrrriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiààààà) qui donne froid dans le dos, surtout multiplié par plusieurs milliers. Avant de plonger sur nous, elles font du surplace et leur cri change, devient plus strident, si c’est sonoriquement possible. Enfin, on a tout fait pour ne pas les déranger mais on peut dire qu’on s’est fait escorter pas mal partout où l’on allait. Ce qui est hallucinant c’est que même quand on ne les voit pas, on entend leur cri, de partout. Il devient le bruit de fond de l’île. Pas de chant de vagues qui se brisent sur les rochers, ni de vent qui fait claquer les haubans des voiliers. Seulement des cris perçants, trop irréguliers pour se faire oublier.

Grimsey, aux frontières du réel...




Isa qui pêche un peu sur le quai...

S'il y avait un smelloscope vous sentiriez la présence des oiseaux!


Il aurait été possible pour Isa et moi, de ne faire de notre périple à Grimsey qu'une rapide expédition de quatre heures, comme le font la majorité des gens. Mais notre amour partagé des petites îles perdues nous a plutôt incité à y passer quatre jours, un excellent choix, avec le recul. L’île de Grimsey a des caractéristiques semblables à celles de l’île d’Entrée (aux Îles de la madeleine), avec ses 6km2 de superficie, ses cent habitants et ses colonies d’oiseaux marins. Petite communauté de pêcheurs à trois heures de ferry de la côte islandaise, cet endroit était parfait pour quelque jours de nordique «dolce farniente».

La majorité des gens qui visitent Grimsey le font dans un but précis, aller mettre les pieds au-delà de la ligne imaginaire de 66 degrés 33", qui marque le début du cercle polaire. À Grimsey, cette limite est simplement signifiée par un poteau indiquant à quelle distance on se trouve des grandes villes du monde. Je ne sais pas pourquoi cette ligne imaginaire m’attirait autant. En fait, déjà à Reykjavik, j’étais plus au nord que Kujjuaq, Iqualuit et Fairbanks (Alaska), j’avais le désir d’aller plus haut. En plus, aller à Grimsey est vraiment plus facile, et sûrement moins dispendieux que d’aller dans le nord du Québec ou du Canada. Ce n’est pas non plus un défi physique, je suis vraiment loin de marcher dans les pas de Bernard Voyer; il suffit de dix minutes de marche sur un chemin semi-asphalté pour s’y rendre. Malgré tout ça, l’attraction était persistante. J’étais excitée comme une enfant qui va à Walt Disney. C’est peut-être ça dans le fond, la rencontre du réel géographique et de l’imaginaire nordique, le désir d’être sur le lieu physique d’un point fictif officiellement désigné, qui fait appel à l’extrême, l’inaccessible, le mystère.

Je peux pas dire que j’étais surprise ou déçue, parce que je ne m’attendais pas à voir ni ours polaire ou faune arctique, d’iceberg ou même de toundra. Je ne m’attendais à rien, mais dans tout ce que j’ai pas imaginé, j’aurais jamais cru que le cercle polaire soit un champs de pissenlits. Ça, ça te tue un imaginaire assez vite merci. C’est pas que c’est laid, en tant que tel, de loin, l’image reste bucolique, mais des pissenlits, merde, ça pousse dans les craques de trottoirs à Montréal. D’un autre côté c’est bien, ça fait pas plus prétentieux qu’ailleurs, les pissenlits sont universels et n’arrêteront pas de pousser à 66 degrés 32" 59' pour contenter les voyageurs en quête de latitude.

Mon expérience à Grimsey n’est pas moins chouette pour autant, c’est une île magnifique, verte et jaune, avec des falaises impressionnantes et des pêcheurs sympathiques. Très calme, pas vraiment touristique. J’ai satisfait mon fantasme géographique et mon imaginaire ne s’en trouve pas trop amoché.

mercredi 21 juillet 2010

Homage postume...en attendant l'écriture




Demain, on s'embarque pour 16h de bateau alors j'aurais surement la chance d'écrire quelques lignes...